Compte-rendu d’un voyage scolaire de jeunes Français à Vienne Par Christian Cheminade (professeur de lettres classiques)

Le compte-rendu d’un voyage scolaire de jeunes Français à Vienne risque fatalement de prendre l’allure d’un dépliant touristique qui vante la diversité des découvertes proposées aux élèves et énumère, en entrechoquant les antithèses obligées, les « facettes contradictoires et en même temps complémentaires » d’une ville si chargées d’art et d’Histoire : descente dans les profondeurs du passé autrichien, sous les voûtes de la crypte des Capucins où reposent les Habsbourg, dans leurs cercueils ostentatoires par leur pompe ou par dépouillement, et ascension de la flèche de la cathédrale Saint Etienne, d’où le regard embrasse la vie et les activités d’une métropole moderne ; parcours musical qui mêle mélodie romantique, opérette viennois et comédie musicale contemporaine, pour s’achever dans la Maison de la Musique, vouée au culte des compositeurs et chefs d’orchestres de passé comme à la création de nouvelles formes d’expression acoustiques ; images de l’architecture viennoise, des stucs et des dorures d’églises baroques aux allures de salles d’opéra jusqu’aux bulbes et aux dissymétries non moins baroques de l’architecte récemment disparu Hundertwasser, en passant par la nudité géométrique de cette maison dont François-Joseph, depuis ses fenêtres de la Hofburg surchargées de corniches et de pilastres, ne voulait pas soutenir le regard de la façade « sans sourcils ».

Et tout cela sans encore parler des restaurants, des Cafés, des pâtisseries, ou des images omniprésentes de Mozart, de l’éternelle Sissi et de son pendant (de son antidote ?) « Sécessionniste » Gustav Klimt…

Pourtant, s’agissant du séjour viennois d’un groupe d’élèves de Terminale organisé par les professeurs d’allemand du Lycées « Les Pierres vives », l’on ne perçoit toute l’originalité et le sens profond de ce projet que quand on croit toucher au comble du poncif viennois et qu’on en vient à évoquer les bals et les valses. Car le désir de participer à deux des célèbres bals de la Saison viennoise,- celui de la Corporation des pâtissiers ( !) et celui d’un Lycée, avec leurs débutantes en robe blanche et leurs débutants en habit -, fut l’une des grandes motivations des élèves volontaires pour ce voyage, au point que certains dès leur Seconde, tous en Terminale, ont suivi les cours d’une école de danse, pour être sûrs de pouvoir élégamment valser en robe longue et costume noir, talons hauts et nœuds papillon, sous les lambris d’un palais viennois. Ils ont payé ces heures de plaisir par leurs efforts, ce triomphe de la frivolité par le sérieux et l’assiduité. Ils ont probablement amélioré leur allemand, sans doute découvert un pays nouveau pour eux ; surtout (en ont-ils eu conscience ?), ils ont vécu ce qui se définit d’un mot : la Civilisation.

Les élèves ont été filmés pour le documentaire diffusé sur ARTE "A chacun son bal" qui peut être regardé en replay sur le site de la chaîne.

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